Il était un des grands chroniqueurs de la République de Weimar, un pionnier des critiques de cinéma, mais en 1934, il doit fuir l’Allemagne nazie pour ses prises de positions politiques mais également à cause de ses publications homosexuelles. D’abord exilé à Paris, il découvre Sanary pendant ses voyages, l’été 1937 et 1939. Après avoir été interné dans les camps de Colombes et Chambaran, il trouve refuge avec son ami Walter Dickhaut, à Sanary en 1940. Déchu de la nationalité allemande par les nazis, il fuit en 1941 aux États-Unis.

Hans Siemsen est le plus jeune d’une fratrie de trois frères et une sœur, dont le père est pasteur protestant en Westphalie. Pendant la Grande Guerre, les quatre enfants quittent l’église et se tournent vers la social-démocratie*. Hans suit un apprentissage en librairie et étudie l’histoire de l’art. En 1913, il est à Paris et fréquente les Allemands du café du Dôme, dont Franz Hessel. Combattant en 1916 et 1917, il est grièvement blessé et soutient la révolution bolchévique à la fin de la guerre.

A partir de 1919 il vit à Berlin et acquiert de la notoriété comme critique de cinéma dans divers revues et journaux comme la Weltbühne, Berliner Tageblatt et Frankfurter Zeitung. Il publie des articles sur Charly Chaplin et Asta Nielsen, Jean Cocteau, sur le jazz, l’antisémitisme et d’autres. Le poète humoristique allemand Joachim Ringelnatz est son ami et l’écrivain Kurt Tucholsky son admirateur. En 1930 il est envoyé par la Frankfurter Zeitung en Russie pour faire un reportage, cependant avec les années il prend ses distances avec le communisme. Il s’engage dans la lutte contre la criminalisation de l’homosexualité et contre la peine de mort. A l’arrivée des Nazis au pouvoir, Hans Siemsen est, en tant que socialiste homosexuel, doublement menacé.

En 1933, il échappe par hasard à l’arrestation et s’exile à Paris. Il rencontre Walter Dickhaut d’onze ans son cadet qui devient son compagnon et dont le vécu l’inspire pour son roman Die Geschichte des Hitlerjungen Adolf Goers. Le livre aborde l’homosexualité (refoulée) dans la Hitlerjugend (jeunesse hitlérienne) et sera édité en anglais en 1940 grâce à Klaus Mann. Dans la même année Siemsen est déchu de sa nationalité allemande et inscrit sur le fichier des individus recherchés par les Nazis. En 1947 le livre est publié en version allemande.

Pendant l’été 1937 Siemsen découvre Sanary et y retourne avec Walter Dickhaut à l´été 1939. À l’éclatement de la Seconde Guerre mondiale il est interné au stade de Colombes, puis de mai à juillet au camp de Chambaran à Viriville en Isère. Il s’évade en 1940 et trouve refuge dans la Villa l’Enclos à Sanary où Walter Dickhaut le rejoint après onze mois de séparation. Siemsen considère que c’est presque un miracle qu’ils soient toujours en vie, cependant leur situation est très précaire. Ils vivent dans le dénuement total et dans l’angoisse permanente. Dans ce contexte les retrouvailles à Sanary avec Franz Hessel, son ami de longue date, sont réconfortantes. Mais Franz, épuisé par deux internements dans les camps, meurt en janvier 1941. Devant la petite communauté allemande Siemsen lui rend un bel hommage dans une courte allocution au cimetière de Sanary.En février 1941, Hans Siemsen et Walter Dickhaut quittent Sanary et prennent à nouveau la fuite. Avec l’aide de Varian Fry et Hubertus Prinz zu Löwenstein, ils émigrent aux États-Unis via Lisbonne.

*La social-démocratie est un courant socialiste réformiste non-marxiste, incarné en particulier par les socialismes allemand et scandinave. Les partis sociaux-démocrates sont étroitement liés aux organisations syndicales, ce qui explique la préférence et la pratique de la négociation, de la concertation pour réformer la société, plutôt que les luttes sociales.

Hans Siemsen s’installe seul à New York, car les autorités refusent l’entrée aux Etats Unis à Walter Dickaut. Pendant deux ans il travaille sous le pseudonyme « Pasteur Silesius » pour la radio Voice of America, mais ne parvient pas à s’intégrer malgré ce travail. Les liens avec les autres émigrés se rompent, les amitiés se brisent, il sombre dans l’alcoolisme. Finalement il retourne en Europe. En 1948, il est en France et un an plus tard son frère Karl l’accueille à Düsseldorf en Allemagne. Siemsen finit ses jours dans la pauvreté, malade et oublié dans un foyer der Arbeiterwohlfahrt* à Essen le 23 juin 1969.

*Secours ouvrier

La Médiathèque Jacques Duhamel de Sanary-sur-Mer propose un fonds regroupant des ouvrages sur le thème Mémoire d’exil à Sanary