Ilse SALBERG & Anton RÄDERSCHEIDT

Ilse Salberg (1901-1947) &
Anton Räderscheidt (1892-1970)

Ayant acheté une parcelle avec maison à Sanary, le peintre Anton Räderscheidt, originaire de Cologne et figure de proue du mouvement artistique, La Nouvelle Objectivité, quitte l’Allemagne, en 1935, avec sa compagne, la photographe juive-allemande, Ilse Salberg et ses deux enfants. Au déclenchement de la guerre, ils résident à Sanary. Anton est interné avec Ernst, fils d’Ilse, en 1939 et 1940 aux Milles, Ilse avec sa fille Brigitte à Gurs. Ils se retrouvent en hiver 1940/41 à Sanary, dans la précarité, les biens et comptes d’Ilse en Angleterre étant bloqués. À l’arrivée des troupes de Mussolini, ils sont expulsés et conduits, à Barjols, par la Gendarmerie française. Après l’arrestation et la déportation d’Ernst vers Auschwitz, le couple et Brigitte réussissent à fuir en Suisse, avec l’aide du boucher de Barjols.

C’est à Sanary qu’Anton Räderscheidt et Ilse Salberg passent les plus heureuses années de leur vie commune. Ils se rencontrent en 1933 à Cologne alors qu’Ilse est mariée en deuxième noces à Rudolf Metzger, un riche bijoutier juif, mécène de Räderscheidt.

En 1934, Ilse quitte son mari pour suivre Anton en France et emmène ses deux enfants, Ernst Meyer, issu de son premier mariage, et Brigitte Metzger avec elle. Après un séjour à Paris, ils descendent à Sanary et achètent dans le quartier de la Cride une parcelle avec maison à laquelle ils ajoutent un atelier pour Anton. Ils partagent leur temps entre Sanary et Paris ; cependant, à Sanary, c’est le grand bonheur. Grâce à l’argent d’Ilse, issue d’une riche famille de marchands juifs, ils vivent confortablement. Ils possèdent une belle voiture, un équipement photographique sophistiqué et une chambre noire pour les photos d’Ilse. Fréquentant le café de la Marine sur le port, ils restent cependant un peu à l’écart des autres exilés. Les Feuchtwanger sont leurs plus proches voisins, mais Anton déteste Lion.

Le 3 septembre 1939, avec la déclaration de guerre contre l’Allemagne leur statut d’exilé politique est requalifié de « ressortissant d’une puissance étrangère ennemie » Leurs comptes en banque sont bloqués et Anton, d’abord assigné à résidence, est interné au camp Les Milles en passant par le centre de rassemblement de Toulon où il se lie d’amitié avec Alfred Kantorowicz. Aux Milles il fait la connaissance de Franz Hessel et retrouve son voisin Lion Feuchtwanger avec lequel les relations se sont améliorées en raison de leur malheur partagé. Heureusement l’internement se termine fin septembre mais le répit ne dure que quelques mois.

Anton Räderscheidt Révision droit d’asile ©Archives de la Ville de Sanary

Anton Räderscheidt Autorisation résidence ©Archives de la Ville de Sanary

Anton Räderscheidt Autorisation résidence ©Archives de la Ville de Sanary

Anton Räderscheidt Etat des biens ©Archives de la Ville de Sanary

Anton Räderscheidt Note de renseignement ©Archives de la Ville de Sanary

À la suite de l’invasion de la France par la Wehrmacht les ressortissants germanophones sont à nouveau internés aux Milles en mai 1940. Faute de transport public, Lion Feuchtwanger, Anton Räderscheidt avec le fils d’Ilse Salberg, Ernst Meyer et Alfred Kantorowicz se rendent ensemble au camp en taxi.

Ce deuxième internement est beaucoup plus éprouvant, l’extradition aux nazis est une menace constante, c’est pourquoi lors d’un transfert en train vers Bayonne, Räderscheidt s’enfuit, se cache et finalement réussit à regagner Sanary.

Pour le nouvel an 1941, Ilse et Anton décident de partager un repas avec les exilés restés à Sanary. L’ambiance n’est pas joyeuse ce premier jour de l’an et ils se demandent ce que leur réserve l’avenir. Ce jour-là, Franz Hessel, épuisé par les deux internements, fait une crise cardiaque et décède quelques jours après.

En 1942 à la suite de la réquisition de leur villa Le Patio par les troupes de Mussolini, Anton et Ilse, avec ses enfants, sont expulsés et conduit à Barjols où Ernst Meyer, fils d’Ilse, est arrêté et déporté. Le couple et Brigitte (fille d’Ilse) parviennent à se sauver en Suisse grâce à l’aide du boucher de Barjols.  Après le décès d’Ilse en 1947, Anton retourne à Paris, rencontre Gisèle et s’installe avec elle en 1949 à Cologne. Dans les années soixante il vient avec sa nouvelle épouse et leurs enfants en visite à Sanary, s’arrête dans le bar de la Marine, mais n’a pas le courage d’aller plus loin… Anton Räderscheidt meurt en 1970 à Cologne des suites d’un accident vasculaire cérébral.