La confrérie de Saint-Pierre

Au XVIIème siècle le danger que représentent les corsaires dans les eaux de Méditerranée est important. Espagnols et Turcs n’ont pas peur de risquer les alentours de Marseille, de Bormes-les-Mimosas ou Hyères pour capturer des navires. Face à cette menace, les pêcheurs de Sanary (autrefois Saint-Nazaire) se regroupent en corporation, la confrérie se constitue en 1661. Pour exercer au mieux son pouvoir de représentation, elle disposait d’un autel dédié à Saint Pierre, leur saint Patron, dans l’Église. Il s’agit de l’une des confréries les plus importantes de la Ville. Lors des processions et cérémonies, le buste de Saint Pierre était par exemple exhibé et venait d’ailleurs en seconde place, juste derrière celui de Saint Nazaire.

Témoignage marquant de la fondation de cette confrérie : le tableau de la Vierge à l’Enfant, figurant Saint Pierre, Saint Paul et les anges montés aux cieux datant de 1661 et exposé au Sanctuaire de la Miséricorde.

L’implication de l’État dans ces possessions maritimes en 1681 bouleverse l’exercice de la communauté de pêcheurs. 110 ans plus tard, en 1790, la dissolution des confréries de pêche est ordonnée par l’Assemblée nationale qui enterre la confrérie de Saint Pierre à Sanary et demande la création de prud’homies.

La prud’homie des pêcheurs

Les prud’homies étaient et sont toujours aujourd’hui des institutions corporatives existantes depuis le Moyen âge, ces dernières ont su se maintenir dans le temps malgré les changements de régime politique. Elles désignent à la fois une communauté professionnelle mais aussi également une juridiction de pêcheurs. Après 1859 les attributions réglementaires, juridictionnelles et disciplinaires des prud’homies sont confirmées et bien que celles-ci aient évolué, leur fonctionnement a su péricliter.

La prud’homie de Sanary qui rassemblait autrefois 68 patrons pêcheurs pour seulement 3500 milles de côtes, perdure encore aujourd’hui. Elle regroupe à ce jour une douzaine de patrons pêcheurs en activité sous cette institution. Avec cinq anciens professionnels retraités, tous ramènent quotidiennement leurs poissons qu’ils vendent sur le port. La prud’homie de Sanary fait également parti des 33 prud’homies de pêche de la côte méditerranéenne française (18 en Provence-Alpes-Côte d’Azur, 11 en Occitanie et 4 en Corse), garantes de certains savoirs et refusant l’exploitation industrielle de la mer.

Confirmées dans leurs pouvoirs judiciaires, les prud’homies restent à ce jour sous la tutelle de la Direction des Affaires Maritimes. Véritables artisans de la pêche locale, nous leurs devons par exemple la réglementation de la pêche aux oursins visant à encadrer leur reproduction et prévenir d’une éventuelle pénurie voire extinction. A Sanary comme à Saint Raphaël, deux grands objectifs se distinguent : la répartition de l’exercice de la pêche sur le territoire, dans une dynamique de partage et de respect des traditions et la préservation du renouvellement de la ressource afin d’assurer la vie des pêcheurs dans le temps.

La pêche autrefois

La pêche côtière a toujours été artisanale et faisait autrefois vivre une grande partie des Sanaryens. Les filets de coton teintés aux écorces de pins étaient plongés dans un chaudron en cuivre remplie d’eau chaude. Ils étaient ensuite étalées à plat le long du port. Au petit matin, lors de l’arrivée des pêcheurs, les sardines « d’aube » étaient rapidement démaillées par les « sardinaux » avec l’aide de plusieurs bénévoles qui étaient parfois mis à mal par les grosses prises de poissons ou de mammifères marins. Parmi les poissons qu’on pêchait, la rascasse (sans laquelle il n’est pas possible de réaliser un vraie bouillabaisse), la baudroie à chair ferme, le Saint Pierre, la murène, le loup, le pageot, le loup, le maquereau, la girelle, le capelan… et tant d’autres.

Élection et rôle du 1er prud’homme

A leurs têtes, les prud’hommes ou patrons pêcheurs sont élus par leurs pairs pour un mandat d’une durée de 3 ans. Ils sont chargés d’organiser le consensus sur les droits d’usage par tirage au sort, d’arbitrer les conflits qui pourraient apparaître et de représenter les intérêts de la pêche artisanale. Seuls autorisés à voter : les patrons avec au moins un an d’ancienneté et 9 mois d’activité sur une période de référence. Du côté des candidats, peuvent se présenter, au poste de premier prud’homme, les patrons d’au moins 35 ans, et aux postes suivants (le nombre de postes est compris entre un et sept selon la taille de la circonscription) ceux d’au moins 30 ans.

La fête de la Saint-Pierre

Malgré la dissolution de la confrérie de Saint-Pierre au XVIIIème siècle, la prud’homie de Sanary continue de procéder aux traditionnelles processions annuelles. Ainsi, une fois par an, chaque dernier week-end de juin, les pêcheurs déambulent dans la Ville avec en tête le premier prud’homme revêtu de son costume traditionnel.

Cette fête provençale permet de maintenir les traditions locales attachées au métier de pêcheur. Une messe est également célébrée pour l’occasion. Les élus de la Ville participent également à une virée en mer, à laquelle les pointus se joignent et au cours de laquelle on procède à jet de couronnes de fleurs en mémoire des pêcheurs et marins disparus.